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Newsletter 18 – Mai 2014 – Procédure civile

La contestation sérieuse... doit vraiment l'être

La pratique judiciaire recherche la rapidité.

Le référé est le 1e réflexe du juriste.

Suivant l’article 809 du code de procédure civile, une demande de provision peut être faite en référé si elle ne se heurte pas à une contestation sérieuse.

La notion de contestation sérieuse devient pour le défendeur une formule sacramentelle et utilisée pour tout : compétence, principe de la créance, montant…

Pour les praticiens, une contestation sérieuse a fini par devenir le synonyme de difficulté en général, quel qu’en soit la nature ou l’intensité.

La COUR DE CASSATION a entrepris de resserrer l’application de la contestation sérieuse pour éviter les défenses dilatoires.

Pour elle, une contestation peut être effectivement sérieuse mais en montrant justement en quoi elle est sérieuse !

Et le Juge des Référés a l’obligation, s’il retient l’existence d’une contestation sérieuse, de la motiver dans son ordonnance.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION 11.07.2013 n° 12-24722.

Disparition de l'adage « Reconvention sur reconvention ne vaut »

Les adages qui ont fait le bonheur de générations de juristes et qui donnent l’impression de sagesse à ceux qui en sont quelquefois dépourvus sont passés de mode.

Plus exactement, leur pertinence est remise en cause.

La COUR DE CASSATION vient de juger que les demandes reconventionnelles (la riposte de celui qui est attaqué) pouvaient prospérer en application des articles 64 et 567 du code de procédure civile.

La COUR DE CASSATION écarte l’ancien adage « RECONVENTION SUR RECONVENTION NE VAUT ». Si DUPONT agit contre DURAND et que DURAND riposte à DUPONT (la demande dite reconventionnelle), DUPONT pourra riposter à la demande de DURAND (la demande reconventionnelle sur une demande déjà reconventionnelle).

En garde !

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION – 10.01.2013 n° 10-28735.

La nouveauté d'une demande en appel n'est pas d'ordre public

Si une règle est dite « d’ordre public », c’est-à-dire qu’elle est suffisamment importante pour ne pas être laissée à la seule argumentation des parties en tant que touchant au fonctionnement de la société, le Juge a l’obligation d’en soulever l’application… si les parties ne le font pas.

Il a bien sûr l’obligation d’en avertir les parties et pour cela de réouvrir les débats.

Si la règle existe et si elle n’est pas d’ordre public, quel est le rôle du Juge ? C’est là sa marge d’interprétation. Il peut soulever l’application de la règle, soit considérer que les parties ont exercé leur liberté de ne pas le faire.

Il va devoir en pratique analyser la conséquence de la règle sur le débat et apprécier si son application est ou non pertinente, équitable, adaptée…

C’est ce que l’on appelle « l’office du Juge ».

Une demande nouvelle en appel n’est pas recevable. Mais si les parties ne le soulèvent pas, la règle n’est pas d’ordre public.

Le Juge peut alors la soulever mais c’est sa simple faculté pour reprendre la formulation de la COUR DE CASSATION.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION 10.01.2013 n° 12-11667.

Le principe de la concentration des moyens

L’idée est que lorsqu’une demande est formulée, elle doit l’être complètement !

C’est aussi l’idée que contrairement aux trains, un procès ne devrait pas en cacher un autre.

Une demande doit être énoncée dans son principal mais aussi avec ses accessoires ou ses compléments sans qu’il soit possible de revenir dans un 2ème temps sur le thème « mais j’ai oublié telle ou telle demande complémentaire ».

Si la demande n’est pas vraiment nouvelle mais était en germe ou consubstantielle de la demande précédente, elle se heurtera au principe dit de « concentration des moyens ».

La COUR DE CASSATION l’a exprimé à contrario.

Je suis convaincu que la COUR DE CASSATION l’énoncera rapidement comme une règle du droit positif à la fois pour simplifier le contentieux et pour responsabiliser les parties dans l’exposé de leurs demandes et de leurs argumentations.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION du 17.10.2013 n° 12-26178.

Exécuter est acquiéscer

L’article 410 alinéa 2 du code de procédure civile énonce le principe suivant lequel l’exécution sans réserve d’un jugement non exécutoire, fût-ce, après en avoir relevé appel, vaut acquiescement.

Si les réserves sont exprimées, tout va bien. Il n’y aura pas acquiescement.

En l’absence de réserves, si un jugement est pour partie exécutoire par provision et pour partie non assorti de l’exécution provisoire, si une partie exécute pour le tout ce jugement, il y aura alors acquiescement.

Pour la COUR DE CASSATION, la règle est claire.

Cette partie acquiesce au jugement. Elle n’a plus le droit de relever appel.

COUR DE CASSATION CHAMBRE SOCIALE 21.01.2014 n° 12-18427.

Opposition ou pourvoi en cassation ?

La règle est très claire : un pourvoi en cassation n’est possible que si le droit à opposition n’est pas ouvert ou que l’opposition n’est pas plus recevable : « Il résulte… de l’article 613 du CPC… que le délai de pourvoi en cassation ne court à l’égard des décisions rendues par défaut, même pour les parties qui ont comparu devant les Juges du fond, qu’à compter du jour où l’opposition n’est plus recevable ».

COUR DE CASSATION 2ème CHAMBRE CIVILE – 19.02.2013 n° 12-11546.

Les pièces peuvent ne pas être communiquées avec les conclusions devant la cour

Il résultait d’un avis de la COUR DE CASSATION du 25 janvier 2012 que « doivent être écartées les pièces invoquées au soutien des prétentions qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions ».

Ceci a conduit à une forme de « carcan procédural ».

La COUR DE CASSATION vient de redonner de la souplesse aux parties en demandant simplement que les pièces soient communiquées dans le délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel, délai traditionnel de caducité.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION – 30.01.2014 n° 12-24145.

Les dépens et la liqudation judiciaire

La COUR DE CASSATION est assez souple à partir du moment où l’utilité existe pour tous les créanciers.

La créance des dépens née d’un acte ou d’une opération potentiellement utile à la procédure constitue une créance née régulièrement après le jugement qui a ouvert la liquidation judiciaire.

Au titre du privilège légal des frais de justice, elle a alors quelque motif d’être payée.

CHAMBRE COMMERCIALE – COUR DE CASSATION 15.10.2013 n° 12-23830.

Le délai raisonnable : suite

Chacun a le droit d’être jugé… dans un délai raisonnable.

Les prévenus connaissent bien cet argument tiré de l’article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.

La définition du délai raisonnable a fait l’objet de nombreuses décisions.

Mais quelle sanction de la méconnaissance du délai raisonnable ?

Pour la COUR DE CASSATION, elle peut ouvrir droit à réparation et donc à dommages mais elle est sans incidence sur la validité des procédures.

CHAMBRE CRIMINELLE COUR DE CASSATION 24.04.2013 n° 12-82863.

La requête et l'assignation peuvent avoir des fondements différents

La situation est assez rare mais il est intéressant de connaître la solution.

Le Juge de l’Exécution est saisi par requête pour autoriser une mesure conservatoire.

La requête est bien sûr motivée.

Dans le délai d’un mois de l’ordonnance, le Juge du fond doit être saisi par assignation.

Quid de l’hypothèse où la demande n’a pas changé mais où le fondement a évolué entre la requête et l’assignation ?

Pour la COUR DE CASSATION, cela ne change rien.

CASSATION 2ème CHAMBRE CIVILE 26.09.2013 n° 12-23234.

Le clerc d'huissier de justice n'est pas un agent public

La question n’était pas sotte.

Bien que trop souvent méconnue, l’obligation pour tout agent public et énoncer de manière détaillée et lisible, son nom et sa qualité sur toute lettre ou tout acte administratif a été édictée par l’article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000.

Les actes d’huissier sont souvent signifiés (à l’exception d’actes obligatoires tels que le procès verbal de saisie) par leurs clercs dont le nom n’apparaît pas.

Un débiteur a imaginé de soulever la nullité d’une telle signification en raisonnant sur le fait que l’huissier de justice, officier ministériel, bénéficie d’une sorte de délégation publique.

Argument balayé par la COUR DE CASSATION.

L’huissier de justice reste un officier ministériel de statut privé.

N’étant pas une autorité administrative, son clerc n’est pas un agent public.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION 20.06.2013 n° 12-16379.

Ne pas confondre action en nulité et action en revendication

Vendre le bien d’autrui semble absurde et mériter toutes les nullités du monde.

Ce n’est pas toujours le cas.

La nullité de la vente de la chose d’autrui ne peut être demandée que par l’acquéreur.

Le propriétaire ne dispose que d’une action en revendication.

Et il est essentiel de choisir la bonne qualification.

La COUR DE CASSATION l’a jugé pour un père qui vend un bien de ses enfants sans autorisation du Juge des Tutelles.

Les enfants engagent une action en nullité de la vente.

La COUR DE CASSATION leur répond qu’ils ont à leur disposition une action en revendication mais pas une action en nullité.

COUR DE CASSATION 15 OCTOBRE 2013.

La contestation, pour être sérieuse, doit porter sur le principe même de la créance

Le Juge des Référés a comme limite à ses pouvoirs de Juge de l’évidence pour accorder une provision l’existence d’une contestation sérieuse.

Mais toute contestation n’est pas sérieuse.

Et en particulier n’est pas sérieuse une contestation qui porte sur le montant, l’étendue de l’obligation mais non sur l’obligation elle-même.

COUR DE CASSATION 11 JUILLET 2013 n° 12-24722.

Le TASSjuge aussi les dommages et intérêts

Le litige entre un organisme de sécurité sociale et son affilié sera de la compétence du TASS.

Est-ce aussi le cas lorsque l’usager agit en responsabilité au motif d’une faute commise dans l’application de la législation sociale ?

Il ne s’agit pas de faire statuer sur les droits ouverts ou non ouverts mais d’examiner le comportement, l’action, les actes de l’organisme de sécurité sociale.

Cela ne change rien.

La compétence est bien celle du TASS.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION 23.01.2014 n° 12-29239.

Le juge d'exécution a compétence pour déclarer un jugement par défaut non avenu

Suivant l’article 478 du CPC, un jugement par défaut (la partie n’a pas pu être touchée utilement) est nul si le bénéficiaire du jugement ne le fait pas signifier dans le délai de six mois.

Qui a qualité pour le constater ou le juger ?

La COUR DE CASSATION donne cette compétence au JEX.

Il est logique de lui ramener tout le contentieux ayant un enjeu d’exécution.

Cela ne facilitera pas cependant sa visibilité en laissant entendre qu’il a bien qualité pour juger de l’existence même du jugement et donc de la créance.

Le risque pris par la COUR DE CASSATION est de laisser imaginer que le JEX offre une 2ème chance au débiteur malheureux, qu’il serait une sorte de Juge d’appel.

2ème CHAMBRE CIVILE COUR DE CASSATION 16.05.2013 n° 12-25101.